dimanche 29 janvier 2012

Faire la gueule

"... « Faire la gueule » peut être un mécanisme actif de défense : ce n’est pas qu’on ne peut pas ressentir d’états d’âme agréables, c’est qu’on ne veut pas, parfois. Parce que ce n’est pas comme ça qu’on veut voir la vie : il faut qu’elle soit triste. Parce qu’on veut punir les autres : en leur montrant que ce qu’ils nous ont fait nous empêche désormais de profiter de l’existence. Ou bien encore parce qu’on veut montrer qu’on est un chef, un leader, un humain dominant : comme on a plein de responsabilités et de soucis, on adopte le masque sombre de la personne-qui-a-des-responsabilités, face aux visages souriants des inconscients et des irresponsables.
On peut noter d’ailleurs que nos états d’âme sont ainsi corrélés à l’ensemble de ce qui se passe dans notre corps. Dans la lignée de ces travaux, la même équipe fit évaluer à des volontaires leur sentiment de satisfaction avec la vie, au travers de questionnaires qu’ils remplissaient soit debout en s’appuyant sur un pupitre haut (position de « fierté »), soit contraints de s’avachir sur une table basse et inconfortable (position de « déprime ») : évidemment, la position haute et droite procurait des réponses de plus grande satisfaction avec son existence. Tous ces travaux incitent donc à penser que la manière d’habiter notre corps a un effet réel, quoique modéré, sur nos humeurs. Même notre manière de respirer joue un rôle dans notre équilibre émotionnel, d’où l’importance dans les troubles anxieux et dépressifs des exercices portant sur la respiration, qui sont inclus dans les approches basées sur la relaxation et la méditation. Et d’où l’importance aussi accordée par les maîtres orientaux à la posture à adopter lors des exercices de méditation (« droite et digne ») et dans la vie quotidienne en général. D’accord, ça nous rappelle un peu notre enfance, « tiens-toi droit et souris à la dame ». Mais puisque c’est la science qui nous le dit …"

Christophe ANDRÉ, « Les états d’âme, un apprentissage de la sérénité », Éd. Odile Jacob, 2009 [2011 pour l’édition poche, n°295], p.380-381

Masque dans un monastère du Ladakh


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