jeudi 22 septembre 2011

Redéfinir les priorités

"Mon propos, je tiens à le redire en pensant particulièrement aux personnes laïques engagées dans l’existence, n’est nullement d’inciter à rejeter les aspects matériels de la vie, les possessions, la nécessaire détente, les plaisirs et les loisirs. Il est légitime d’organiser matériellement sa vie et de profiter, comme on dit, de ses bons côtés. De même, il peut être utile de se cultiver, de parfaire ses connaissances en matière philosophique, littéraire, artistique, scientifique, et de se donner également les moyens de participer à la vie de la cité. Mais j’ai la conviction que ces activités matérielles ou intellectuelles ne peuvent nous contenter véritablement que si elles s’exercent sur la base d’une mise en œuvre de notre potentiel de sagesse, que si l’on fait ainsi appel à notre sagesse intérieure. Nous ne serons véritablement comblés que si nous plaçons nos activités ordinaires dans une perspective spirituelle.
C’est une constatation d’évidence, qui vaut particulièrement – mais pas seulement – pour l’Occident, que la plupart des gens placent au premier plan de leurs préoccupations les aspects matériels, au second plan tout ce qui touche à la culture et au développement intellectuel, et relèguent à l’arrière-plan, si tant est que cet aspect ne soit pas totalement occulté, ce que je viens d’appeler l’usage de la sagesse. Il me semble que tout le monde pourrait trouver un grand bienfait à renverser l’ordre des priorités, à mettre au premier plan la mise en œuvre de la sagesse, et à placer la recherche des satisfactions culturelles, intellectuelle et matérielles respectivement aux second et troisième rangs. Lorsque je parle de ce nouvel ordre de priorités, je ne parle pas tant de la quantité de temps consacrée aux différentes activités, que de la force de l’intérêt et de l’attention portés à chacune d’entre elles. Je suis intimement convaincu que les êtres ne perdraient rien en adoptant cette nouvelle « hiérarchie des valeurs », et qu’au contraire ils y gagneraient beaucoup en efficacité, en justesse et en bien-être sur tous les plans. Non seulement ils ne perdraient rien et leur bien-être augmenterait, mais leur vie prendrait son vrai sens."


« Le Moine et le Lama » , Dom Robert Le Gall – Lama Jigmé Rinpoché, entretiens avec Frédéric Lenoir (2001), Le Livre de Poche n°15512, 2003, p. 148-150


Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire