dimanche 28 novembre 2010

Paresse à l'occidentale

"Combien d'entre nous, (...)sommes pris dans le tourbillon de ce que j'appelle aujourd'hui une « paresse active » ? Il existe, naturellement, différentes sortes de paresse : il y a la paresse à l'orientale, et celle à l'occidentale. La paresse à l'orientale est pratiquée à la perfection en Inde. Elle consiste à flâner au soleil toute la journée, sans rien faire, à éviter toute forme de travail et toute activité utile, à écouter de la musique de film hindie à la radio et à discuter avec des amis tout en buvant force tasses de thé. La paresse à l'occidentale est tout à fait différente : elle consiste à remplir sa vie d'activités fébriles, si bien qu'il ne reste plus de temps pour affronter les vraies questions.
Si nous examinons notre vie, nous verrons clairement que nous accumulons, pour la remplir, un nombre considérable de tâches sans importance et quantité de prétendues « responsabilités ». ... Nous nous disons que nous voulons consacrer du temps aux choses importantes de la vie, mais ce temps, nous ne le trouvons jamais. Rien qu'en se levant le matin, il y a tant à faire : ouvrir la fenêtre, faire le lit, prendre une douche, se brosser les dents, donner à manger au chien ou au chat, faire la vaisselle de la veille au soir, s'apercevoir qu'on n'a plus de sucre, ou plus de café, aller en acheter, préparer le petit déjeuner – la liste est interminable. Puis, il y a les vêtements à trier, à choisir, à repasser et à replier. Enfin il faut se coiffer, se maquiller... Impuissants, nous voyons nos journées se remplir de coups de téléphone, de projets insignifiants ; nous avons tant de responsabilités... Ne devrions-nous pas dire plutôt d'« irresponsabilités » ?
C'est notre vie qui semble nous vivre, nous porter et posséder sa propre dynamique étrange. En fin de compte, tout choix et tout contrôle semblent nous échapper. Bien sûr, il nous arrive d'en ressentir un certain malaise, d'avoir des cauchemars et de nous réveiller en sueur. Nous nous demandons alors : « Que suis-je en train de faire de ma vie ? » Mais au petit déjeuner, nos peurs se sont dissipées ; nous reprenons l'attaché-case et... nous voici revenus au point de départ."
SOGYAL Rinpoché, « Le livre tibétain de la vie et de la mort », Editions de la Table Ronde 2003, p. 46-47, Egalement disponible dans le Livre de Poche.


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