samedi 30 avril 2011

Communication non violente

"Le premier principe de la communication non violente est de remplacer tout jugement – c’est-à-dire toute critique – par une observation objective. Au lieu de dire « Vous avez fait preuve d’incompétence », ou même « ce rapport n’est pas bon » - ce qui met immédiatement la personne à qui nous parlons sur la défensive -, il vaut mieux tout simplement être objectif et précis : « Dans ce rapport, il y a trois idées qui me semblent manquer pour communiquer notre message. » Plus l’on est précis et objectif, plus ce que l’on dit est interprété par l’autre comme une tentative légitime de communication plutôt que comme une critique potentielle. Le psychologue Marshall Rosenberg cite une étude qui s’est penchée sur la relation entre la littérature d’un pays et la violence de ses habitants : selon celle-ci, plus les œuvres contiennent des termes qui classent les gens – qui les jugent comme « bons » ou « mauvais » -, plus la violence s’exprime librement dans les rues du pays.

Le deuxième principe est d’éviter tout jugement sur l’autre pour se concentrer entièrement sur ce que l’on ressent. C’est la clé absolue de la communication émotionnelle. Si je parle de ce que je ressens, personne ne peut en débattre avec moi. Si je dis : « Tu es en retard, c’est ton égoïsme habituel… », l’autre ne peut que contester ce que j’avance. Par contre, si je dis : « Nous avions rendez-vous à huit heures et il est huit heures et demie. C’est la seconde fois en un mois ; quand tu fais cela, je me sens frustrée et même parfois humiliée », il ne pourra remettre en cause mes sentiments. Ceux-ci m’appartiennent entièrement ! Tout l’effort consiste à décrire la situation avec des phrases qui commencent par « je » plutôt que par « tu » ou par « vous ». En parlant de moi, et seulement de moi, je ne critique plus mon interlocuteur, je ne l’attaque pas, je suis dans l’émotion, donc dans l’authenticité et l’ouverture. Si je m’y prends bien et si je suis miment honnête avec moi-même, j’irai même jusqu’à me rendre vulnérable en lui indiquant comment il m’a fait mal. Vulnérable parce que je lui aurai dévoilé une de mes faiblesses. Mais, le plus souvent, c’est justement cette candeur qui va désarmer l’adversaire et lui donner envie de coopérer – dans la mesure où lui aussi souhaite préserver notre relation. C’est exactement ce que faisait Georges avec sa tante Esther (« Quand vous m’appelez… je me sens frustré…  ») ou encore l’opératrice de la compagnie aérienne (« quand vous élevez la voix, je ne peux pas me concentrer pour vous aider… »). Ils ne parlaient que de deux choses : ce qui venait de se passer objectivement et qui ne prêtait à aucun débat – et ce qu’ils ressentaient. Pas un mot n’était dit sur ce qu’ils pensaient de l’autre parce que cela n’aurait servi à rien.
Selon Rosenberg, il est encore plus efficace non seulement de dire ce que l’on ressent, mais aussi de faire part à l’autre de l’espoir partagé qui a été déçu. « Quand tu arrives en retard, alors que nous avons rendez-vous pour aller au cinéma, je me sens frustrée parce j’aime beaucoup voir le début d’un film. C’est important pour moi pour pouvoir profiter de toute la séance. » Ou encore : « Quand tu ne m’appelles pas pour donner de tes nouvelles pendant une semaine, j’ai peur qu’il ne soit arrivé quelque chose. J’ai besoin d’être assurée que tout va bien. » Ou, dans le contexte du travail : « Quand vous laissez circuler un document avec des fautes d’orthographe, je me sens personnellement embarrassé parce que c’est mon image et celle de toute l’équipe qui sont affectées. Je tiens beaucoup à notre image et à notre réputation, surtout après que nous avons travaillé aussi dur pour nous faire respecter. »

Servan-Schreiber David – Guérir le stress, l’anxiété et la dépression sans médicaments ni psychanalyse, Éditions Robert Laffont 2003, p. 212-213

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