jeudi 9 janvier 2014

Pourquoi parfois il n’y a rien, pourquoi parfois il y a tout

La sainteté n’est rien de ce qu’on imagine. J’ai rencontré aujourd’hui une troupe de primevères bavardant à l’air libre et faisant de leurs bavardages une prière qui montait droit au ciel. Leur cœur était ouvert aux pluies, aux sécheresses et même à l’arrachement. Ne pas choisir dans ce qui vient était leur manière impeccable d’être saintes. Je piétinais dans mes pensées quand elles sont apparues sur le bas-côté de la route, offrant à la lumière le berceau coloré de leurs pétales. Le vent faisait vibrer leurs formes, imprimant sur un fond d’herbes un texte digne de louanges.
Tous ceux que je rencontre me font de la peine. Je vois une ombre – un chagrin, une absence, un manque – traverser leurs yeux même quand ils rient, comme un petit lézard qui se faufilerait entre deux pierres, tremblant d’être aperçu. Et moi, je suis pareil à eux. Mon cœur bat dans le noir. La vie s’attriste de ne pouvoir nous atteindre que rarement. Elle est avec nous comme une mère qui donnerait son cœur à manger à ses enfants, et ses enfants ne voudraient pas goûter à cette nourriture sublime, ils ne voudraient même pas en entendre parler.
L’éclat des primevères, pour m’arriver, avait dû déchirer la nuit qui entoure mon cœur. Je tiens pour un miracle de voir des choses très pauvres. Je ne me lasse pas de ces miracles et suis bien incapable d’expliquer pourquoi parfois il n’y a rien, pourquoi parfois il y a tout. Le paradis, ce serait de vivre une journée entière comme une seule de ces primevères.
(BOBIN Christian, « Ressusciter » (2001), Gallimard, p. 58-59)

Pratiquer la méditation [de pleine conscience], c’est revenir au moment présent pour rencontrer la fleur, le ciel bleu, ... Le bonheur est là - disponible.
(Thich Nhat Hanh, « La sérénité de l’instant », préface du XIVème Dalaï-lama, J’ai Lu n°8863, 2009, p. 49)
Primevère commune (acaule)
Source : Faaxaal, forum de partage de photos Nature

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