jeudi 7 novembre 2013

L'expérience de l'ours blanc

Faut-il arrêter de penser ?
Essayez le petit exercice suivant. Mettez ce livre de côté et, pendant une minute ou deux, évitez de penser à un ours blanc.
Alors, vous y êtes arrivé ?
Pas vraiment, j’imagine. Lorsqu’ils reçoivent cette consigne, la plupart des gens ne peuvent s’empêcher de penser à des ours blancs. Et ce qui se passe réellement est plus surprenant que vous ne le pensez. Pour les besoins d’une expérience rendue publique en 1987, le psychologue Daniel Wegner et ses collègues ont divisé des étudiants en deux groupes. Le premier devait ne pas penser à un ours blanc pendant cinq minutes et le second devait y penser délibérément. Comme on pourrait s’y attendre, les sujets du premier groupe ont été incapables de réprimer la pensée d’un ours blanc. Puis les deux groupes ont reçu la consigne de penser délibérément à un ours blanc pendant cinq autres -minutes. Les étudiants à qui on avait demandé de réprimer leurs pensées dans la première phase de l’expérience se sont mis à songer beaucoup plus souvent à un ours blanc que ceux du second groupe. Comme le montre notamment cette étude, ce à quoi nous résistons persiste. Notre esprit est affamé, toujours en quête d’éléments susceptibles de l’occuper et de le faire cogiter moment après moment.
Tentons une autre expérience, si-vous le voulez bien. Mettez de nouveau ce livre de côté et, assis les yeux fermés laissez votre esprit s’apaiser et toutes vos pensées s’arrêter complètement pendant quelques minutes à peine.
Alors, vous y êtes arrivés ? Sans doute pas, comme pour l’exercice précédent. La plupart d’entre nous sommes naturellement pourvus d’un esprit semblable à un singe qui bondit dans tous les sens, s'accroche aux feuilles et aux branches de notre conscience, pense à ceci, puis à cela, de manière presque aléatoire.
Mais si réprimer nos pensées ne fonctionne pas, comment pouvons-nous calmer notre esprit-singe ? Comment pouvons-nous l'amener à une forme d'apaisement, à une attention soutenue dans l'instant présent ? Il suffit d'observer le comportement d'un jeune enfant totalement absorbé par l'examen de la paume de sa main, parfois pendant des minutes entières, pour avoir un début de réponse. L'esprit humain semble doté de mécanismes innés capables de générer une attention soutenue, vigilante et engagée. Nous devons juste apprendre à les utiliser.
Quand nous étions beaucoup plus jeunes, nous le faisions spontanément. Depuis, les exigences quotidiennes ont encombré notre esprit et notre attention s'est fragmentée. Dans la vie professionnelle plus qu'ailleurs ce phénomène est flagrant et ses conséquences se manifestent sous la forme d'erreurs coûteuses, de querelles inutiles, d'actions inefficaces, de doublons, de confusion et — peut-être surtout — de stress. Mais la bonne nouvelle, c'est que, par la pratique de la méditation, vous pouvez entraîner votre esprit à ramener encore et encore votre attention vagabonde sur un objet unique.
(CHASKALSON Michael, « Méditer au travail pour concilier sérénité et efficacité » (2011), Préface de Christophe ANDRÉ (2013), CD audio d’exercices conçus et lus par Christophe ANDRÉ (2013), Éditions des Arènes 2013, p. 58-61)


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