samedi 29 décembre 2018

La volonté

[...] Le terme de volonté appartient au langage courant (l’ensemble des forces mentales portant à l’action) ou philosophique (le pouvoir de se déterminer soi-même). En psychologie, on utilise plutôt le terme d’autocontrôle, qui désigne la capacité à réguler ses comportements, en fonction de ses objectifs et de ses valeurs.
Autrement dit, l’autocontrôle est la capacité à s’engager dans un comportement qui ne va pas forcément apporter des bénéfices à court terme, mais en assurer à long terme : pour un étudiant, s’abstenir de certaines sorties pour travailler ses examens ; pour un gourmand, se retenir de reprendre du gâteau pour préserver sa ligne et sa santé ; pour tout le monde, ne pas abandonner à la première difficulté, etc.
Rien d’étonnant à ce que la volonté, ou l’autocontrôle, sa version scientifique, revienne aujourd’hui sur le devant de la scène dans nos sociétés de dérégulation des désirs et de pilonnage d’incitations en tout genre (à manger, à acheter, à consommer des contenus digitaux, à se faire plaisir). Comme le contrôle jadis effectué par les groupes d’appartenance (famille, proches, voisins…) a diminué, de plus en plus de personnes ont aujourd’hui du mal à faire preuve de volonté et à résister à des incitations conçues pour faire gagner de l’argent aux entreprises, et non pour améliorer la santé des citoyens.

De petites luttes permanentes…
Mais l’exercice de la volonté ne doit pas être perçu comme une lutte occasionnelle face à des tentations ponctuelles : il s’agit d’un travail permanent et parfois inconscient, de l’entretien régulier d’un pare-feu anti-tentation, anti-dispersion et anti-démotivation. Toutes ces petites luttes dépendent de multiples facteurs, dont certains sont biologiques (notre niveau de glycémie joue ainsi sur notre volonté), mais dont la plupart sont psychologiques : d’où l’importance d’identifier nos moments de faiblesse et d’agir pour les surmonter.
Selon les chercheurs, la volonté ressemble à un muscle, qui s’exerce mais se fatigue aussi : après avoir pris plusieurs décisions ou résisté à plusieurs tentations, nous sommes pour quelque temps plus vulnérables : c’est le mécanisme dit de « déplétion » ou d’« épuisement de l’ego ». Ne nous épuisons donc pas, mais entraînons-nous ! En effet, tous les efforts comptent, car il existe un effet de généralisation : faire preuve de volonté dans des domaines même anecdotiques, comme se tenir droit ou ne plus dire de gros mots, va retentir favorablement sur tous les autres (passer moins de temps sur Internet ou rester centré sur une tâche difficile).

… et indispensables
Le travail sur la volonté n’est sans doute pas ce qu’il y a de plus amusant ni de plus glamour dans la conduite de notre vie intérieure. Mais il est indispensable. Le philosophe Alain notait dans ses Propos : « Ce n’est pas une petite science, ni facile, que de savoir vouloir. »
Pas facile, certes, mais le jeu en vaut la chandelle, comme le souligne un autre philosophe, André Comte-Sponville, qui rappelle que « la volonté n’est pas seulement une faculté ; c’est aussi une vertu ».
Une vertu qui nous aide à mieux vivre, et à construire notre liberté de nous accomplir, nous réjouir et nous rapprocher de nos idéaux…

(ANDRÉ Christophe, « La vie intérieure », Éd. L’Iconoclaste, 2018, , p. 47-49)

Jardin de cactus (Lanzarote, Îles Canaries [Espagne])

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