vendredi 17 avril 2015

La prison du nombrilisme

Le nombrilisme, parce qu'il nous fige, clôt notre identité à quelques descriptions limitées de nous-même, nous enferme, nous coupe des apprentissages que nous pourrions vivre et nous prive des expériences qui entreraient en contradiction avec cette conceptualisation. Cela revient à nous accrocher à l'histoire que nous nous racontons sur nous, envers et contre tout. Nous nous chosifions, nous collons à ce masque, ce costume que l'on (nous) a fait endosser au fil des années. C'est ce à quoi fait référence Lorenzaccio dans la pièce éponyme de Musset, piégé par le rôle qu'il s'est donné : « Le vice a été pour moi un vêtement ; maintenant il est collé à ma peau... ».
Que cette histoire soit liée au groupe auquel nous nous identifions, à notre caractère ou à notre personnalité, elle finit de toute manière par nous emprisonner. Cette identification nous fait aussi perdre de vue que nous sommes liés aux autres et à la nature. Elle nous fait croire à une entité stable, autonome, séparée du reste du monde. Cette perception nourrit nos comportements égoïstes et compétitifs qui en fin de compte se retournent contre nous. « Quand le bonheur égoïste est le seul but de la vie, la vie est bientôt sans but », écrivait avec sagesse Romain Rolland.
(KOTSOU Ilios, « Éloge de la lucidité », Éditions Robert Laffont, 2014, Préface de Christophe ANDRÉ, Postface de Matthieu RICARD, p.119-120)

Exposition Folon, parc de La Hulpe [2008] (Belgique)

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