mercredi 19 février 2014

Pourquoi s'intéresser à l'attention ?

Assis dans l'herbe face à l'étang, j'attends. Un poisson vient de bondir hors de l'eau et j'attends son retour. Je suis immobile, le regard tranquillement posé sur la surface reflétant la lumière du soleil. Un petit bruit à droite. Fausse alerte. Je n'ai pas bougé, même pas mes yeux. Un petit bruit à gauche. Toujours rien. Le fuyard tarde à revenir. Je fixe toujours, sans bouger. Pourtant, quelque chose en moi se déplace sans cesse. Ce qui bouge quand rien ne bouge, c'est l'attention.
Plus foudroyante encore que mon regard, mon attention balaye le plan d'eau à la recherche de sa proie. À gauche, à droite, droit devant, partout à la fois. Parfois sous mon contrôle, parfois libre, indépendante et capricieuse. Toujours fougueuse, et souvent fugueuse. Pourquoi s'intéresser à l'attention ? Parce qu'elle détermine notre perception du monde, notre rapport à ce qui nous entoure et à nous-même. Elle éclaire le monde et nos pensées, nos sensations et nos sentiments comme une torche. « Mon expérience est définie par ce à quoi je porte attention », disait William James, l'un des pères de la psychologie moderne. Faire attention à un objet, à une scène ou à un être, c’est le faire exister dans le champ de son expérience sensible, c’est lui donner vie. L'attention est un don. On fait attention à quelqu'un, on lui porte attention, comme s'il s'agissait de faire ou d'apporter un cadeau. En anglais, faire attention se dit to attend, ce qui signifie aussi « assister », « être présent ». Faire attention à un proche, c'est être présent à ses côtés... vraiment. Car on peut être présent physiquement tout en étant absent, perdu dans ses pensées - « Je t'ai trouvé absent ».
(LACHAUX Jean-Philippe, « Le cerveau attentif ; Contrôle, maîtrise et lâcher-prise » (2011), Éditions Odile Jacob Poche n°328, 2013, p. 9-10)

Le Lac de Lispach, Vosges (France)

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