vendredi 6 février 2015

La résonance empathique, prélude à la compassion

... Mengzi (ou Mencius), un sage chinois du IIIème siècle avant notre ère, écrivait ... : « Tous les hommes ont un esprit, et cet esprit ne supporte pas de voir souffrir les autres. »
Aujourd'hui, les neurosciences confirment la position de Mengzi en fournissant les données qui manquaient pour clore ce débat vieux de plusieurs siècles. Quand nous voyons quelqu'un qui souffre, les circuits correspondants s'activent dans notre cerveau et cette résonance empathique devient le prélude à la compassion. Nous allons automatiquement porter secours à un enfant qui hurle de terreur ; nous avons automatiquement envie de prendre dans nos bras un bébé qui sourit. Ces pulsions émotionnelles irraisonnées provoquent en nous des réactions non préméditées et immédiates. Le fait que ce passage de l'empathie à l'action se produise à une telle rapidité suggère l'existence de circuits consacrés à cette séquence. La sensation de détresse suscite le désir d'aider.
Entendre pousser un cri d'angoisse active en nous les mêmes circuits cérébraux que l'expérience vécue de l'angoisse et active aussi le cortex prémoteur, signe que nous nous préparons à agir. De même, une histoire triste ... active le cortex moteur – siège du mouvement – de celui qui écoute ainsi que l'amygdale et les circuits concernés par la tristesse. Cette empathie signale ensuite à l'aire motrice du cerveau, où s'élabore notre réponse, quelle action entreprendre. Nos perceptions initiales nous préparent à l'action, voire prédisposent à agir.
Les réseaux neuronaux de la perception et de l’action possèdent un code commun dans le langage du cerveau. Ce code permet à tout ce que nous percevons de provoquer presque instantanément la réaction appropriée.
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Darwin [dans son Traité des émotions publié en  1872] voyait dans chaque émotion une prédisposition à agir de façon spécifique : la peur déterminant la fuite ou le combat ; la joie poussant les êtres à s'embrasser ; etc. L'imagerie cérébrale confirme aujourd'hui qu'il avait raison, et qu'au niveau neuronal, la contagion émotionnelle prépare, elle aussi, le cerveau à réagir de façon appropriée.
La loi de la nature veut qu'un système biologique utilise le moins d'énergie possible. En activant les mêmes neurones pour la perception et pour l'action, le cerveau respecte cette loi. Et cette économie s'étend d'un cerveau à l'autre. Quand nous percevons la détresse d'autrui, le lien perception-action nous pousse naturellement à lui venir en aide. Ressentir avec nous détermine à agir pour.
(GOLEMAN Daniel, « Cultiver l’intelligence relationnelle » (2006), Éditions Pocket, n°14433, 2013, p. 104-105)

Lac noir, Zabljak, Durmitor National Park (Monténégro)

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