vendredi 22 mars 2013

La maîtrise de l’attention : tout un art

Jusqu'à présent, nous n'avons envisagé que l'entraînement de la concentration. Il s'agit bien sûr d'une composante essentielle de l'entraînement de l'attention, mais ce n'est pas suffisant. Vous êtes peut-être capable de courir vite et longtemps, mais si vous ne courez pas dans la bonne direction, cela ne sert à rien. De même, votre concentration ne vous sera utile que si vous savez vous en servir. Si ce n'est pas le cas, vous finirez comme le mathématicien grec Thalès, dont Platon raconte qu'il était un jour si absorbé par le ciel qu'il tomba dans un puits . Quelle concentration ! Mais quelle inattention...
Comme l'illustre cette histoire, la plupart des fautes d'inattention de la vie de tous les jours ne sont pas dues à une mauvaise capacité de concentration. Le plus souvent, l'erreur vient simplement d'une mauvaise programmation de l'attention soit parce que nous n'avons pas fait assez attention, alors que nous aurions facilement pu y arriver (mauvaise intensité), soit parce que nous n’avons pas porté notre attention là où il le l'allait (mauvaise cible), soit encore parce que nous n'avons pas fait attention au bon moment ou suffisamment longtemps (mauvais timing). Il s'agit souvent de petites actions courtes, mais mal menées ; un verre cassé, des clés oubliées... Ça vous rappelle quelque chose ? Si quelqu'un nous avait rappelé de bien faire attention au verre ou à nos clés, nous aurions su nous concentrer suffisamment pour laver le verre sans le casser ou pour ne pas oublier nos clés. Ce n'est donc pas notre capacité de concentration qui est en cause, mais notre capacité à programmer notre attention. Ces erreurs se produisent le plus souvent lorsque nous sous-estimons la difficulté d'une tâche et que nous n'utilisons pas correctement notre système exécutif. L'attention évolue à son gré, sans directive particulière. En admettant qu'un dispositif d'entraînement de la concentration existe, il ne nous empêcherait pas de continuer à casser des verres ou d'oublier nos clés. Cela ne sert à rien d'avoir des gros muscles si on ne les utilise pas. La maîtrise de l'attention n'est pas qu'une affaire de musculation ; la maîtrise de l'attention est, je le répète, un art.
(LACHAUX Jean-Philippe, « Le cerveau attentif ; Contrôle, maîtrise et lâcher-prise » (2011), Éditions Odile Jacob Poche n°328, 2013, p.319-320)

Dans le jardin Majorelle, Marrakech (Maroc)

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