J’ai appris à identifier cette pulsion et à m’en méfier. Je travaille dur à lui résister. Elle m’incite à lire pour la énième fois le contenu diététique sur la boîte de céréales en prenant mon petit déjeuner. Cette impulsion se nourrit de n’importe quoi pourvu que ça occupe ailleurs. Le journal du matin est la tentation idéale, ou le catalogue de jardin, ou n’importe quel écrit qui traîne. Elle récupère tout pour m’abrutir avec la complicité de mon esprit embrumé. Elle me remplit le ventre sans que je puisse vraiment apprécier mon petit déjeuner. Cette pulsion ravageuse me rend parfois indisponible à ce qui m’entoure. Ainsi, je ne vois pas le rayon de lumière jouer sur la table…
Il me plaît de simplifier ma vie afin de contrecarrer de telles impulsions et de permettre à toute nourriture d’alimenter mes racines profondes. Cela signifie que je m’efforce de ne faire qu’une seule chose à la fois. D’être disponible aussi. ... Simplifier la vie veut dire moins de déplacements au cours d’une journée, voir moins afin de voir mieux, faire moins afin de faire plus, acquérir moins afin de posséder plus. Tout est lié. ... Cependant, parmi le chaos organisé [de la vie quotidienne], la complexité de la vie de famille, ses frustrations et ses dons merveilleux, il y a toujours moyen de choisir la simplicité dans les petites choses. ... Ralentir le rythme nous simplifie la vie. ...
Je m’efforce de dire non, afin de me simplifier la vie, mais c’est difficile. C’est véritablement une discipline ardue qui mérite tous nos efforts. Parfois, il s’agit d’un choix délicat, car il y a des opportunités et des demandes auxquelles il faut répondre. Cela exige une adaptation, une réévaluation constantes. Mais je me suis rendu compte que le principe de simplifier les choses de la vie me rend attentif à ce qui est important, à la corrélation entre l’esprit et le corps et l’univers entier. On ne peut jamais tout contrôler ; mais le choix de la simplicité ajoute à l’existence un sentiment de liberté qui nous échappe si souvent et l’occasion de découvrir que le moins est peut-être le plus.
(Dr Jon KABAT-ZINN, « Où tu vas, tu es », 1994, J’ai Lu n°7 516, 2009, p.83-85)
Jon Kabat-Zinn est l’inventeur d’une méditation accessible à tous : la « méditation en pleine conscience ». À ce jour [en 2012], plus de 550 centres, hôpitaux ou cliniques utilisent la MBSR aux États-Unis, et plus de 700 à travers le monde, l’utilisent comme outil de soin.
« Simplicité, simplicité, simplicité ! Je vous le dis, n’ayez que deux ou trois affaires en cours, et non des centaines ou des milliers…
Au milieu de cette mer agitée de la vie civilisée, il faut affronter tant de tempêtes et de sables mouvants que l’homme qui réussit à survivre sera certes un navigateur avisé pour ne pas sombrer par le fond et pour arriver enfin à bon port. Simplifiez, simplifiez ! » (Henry David THOREAU, « Walden », 1854)
Passiflore, Burano (Italie) |
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