Il est intéressant de noter à ce propos qu'il existe deux voies dans la méditation bouddhiste, d'où est issue la pleine conscience. Celle de l'apaisement, appelée shamatha et celle de la « vision pénétrante », appelée vipassana. La première voie est nécessaire pour que la seconde s'exerce pleinement. L'esprit agité et dispersé ne peut poser sur le monde un regard lucide. Il reste dans une représentation du monde, mais il n'est pas dans le monde. Son intelligence est donc, au sens propre, bornée : limitée, restreinte. Quel intérêt ?
La pleine conscience doit nous aider à ne pas en rester au « miroitement du réel ». La vision pénétrante nous permet de sonder la nature des choses, de ne pas nous laisser abuser par les apparences. La philosophe Simone Weil écrivait : « L'intelligence n'a rien à trouver, elle n’a qu'à déblayer. » Nous avons souvent ainsi à déblayer dans notre esprit tout ce qui fait obstacle à une vision juste et précise du monde, qui émergera alors d'elle-même comme une évidence. La quête de la vision pénétrante n'est pas, pour les penseurs bouddhistes, une question théorique ou philosophique : la manière dont nous voyons et comprenons la réalité pèse de tout son poids sur notre bien-être et s'avère responsable, si elle est inadéquate, d'une part importante de nos souffrances et de celles du monde. Plusieurs concepts fondamentaux émergent ainsi de cette recherche de clairvoyance. Parmi les plus importants, citons l'interdépendance, la vacuité et l'impermanence.
(Christophe ANDRÉ, « Méditer, jour après jour », Éd. L’iconoclaste, 2011, p.162-164)
Jardin botanique de Funchal (Madère, Portugal) |
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