Il n'existe pas, à l'heure actuelle, d'exercice miracle qui entraîne spécifiquement l'attention, comme les pompes entraînent les muscles des bras. Il existe en revanche des milliers d'activités humaines qui exigent de l'attention, depuis le golf jusqu'au violon, en passant par la cuisine, mais ce n'est pas tout à fait pareil. S'il suffisait, pour entraîner l'attention de pratiquer régulièrement une activité qui demande d’être attentif, nous serions tous des champions olympiques de la concentration, car la quasi-totalité des activités de la vie courante l'exigent ; mais cela ne suffit pas, malheureusement. Pourtant, chaque activité de la vie quotidienne est effectivement l'occasion d'améliorer son attention, à condition de la réaliser dans ce but. Tout est affaire d'état d'esprit. La cérémonie du thé, telle qu'elle est pratiquée au Japon, en est un bon exemple. Bien qu'il ne s'agisse que de préparer du thé – une activité somme toute banale –, l'état d'esprit dans lequel se déroulent les préparatifs en fait un exercice d'attention. Ce n'est donc pas le thé lui-même qui compte, mais la qualité d'attention accordée au cérémonial. Vous pouvez préparer le thé tous les jours sans jamais améliorer vos capacités d'attention, mais le jour où vous en faites une cérémonie, l'entraînement commence. La cérémonie du thé illustre donc le fait que toute activité, aussi simple soit-elle, peut être l'occasion, d'entraîner son attention, à condition de la considérer comme telle. Libre à vous d'inventer la cérémonie de la vaisselle, de la découpe du pain ou de la cuisson des pâtes !
Si l'immense majorité de nos activités nécessitent notre des attention sans toutefois l'entraîner, c'est parce que leur but premier n'est pas celui-là. Le golfeur cherche avant tout à mettre sa balle dans le trou et le violoniste à jouer avec justesse et émotion. L’attention est un moyen pour atteindre ce but, pas une fin. Ces activités contribuent parfois à stabiliser l'attention, mais toujours de façon incidente et annexe. Quelle que soit la discipline que l'on souhaite maîtriser, le travail de l'attention fait rarement l'objet de séances ou d'exercices d'entraînement dédiés. Ces séances servent plutôt à développer des automatismes techniques : l'élève répète les mêmes procédures motrices ou cognitives jusqu'à ce qu'il soit capable de les produire de façon réflexe, sans y penser, ou autrement dit, sans y faire attention. Nous arrivons donc à une sorte de paradoxe du point de vue de l'entraînement de l'attention, un peu comme si, à force de faire des pompes pour renforcer votre musculature, votre corps s'adaptait pour les faire sans utiliser les muscles des bras. Le cerveau semble toujours à la recherche du moindre effort...
(LACHAUX Jean-Philippe, « Le cerveau attentif ; Contrôle, maîtrise et lâcher-prise » (2011), Éditions Odile Jacob Poche n°328, 2013, p.304-305)
Arches d'un viaduc, Bretagne (France) |
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