La première concerne l'ouverture attentionnelle : l'attention peut ainsi être focalisée (étroite) ou ouverte (large). Dans l'attention focalisée, on dirige un faisceau attentionnel étroit, par exemple sur une action (être concentré sur ce qu'on fait), un spectacle (être absorbé par ce qu'on voit ou entend), ou des pensées (« partir » dans ses réflexions ou ses ruminations). L'attention ouverte, à l'inverse, tend à s’élargir, à se détacher de ses objets initiaux, à se libérer doucement de l’identification aux pensées ou aux ressentis. Et à inclure d’autres objets. C’est ce qui se passe lorsque, tout en observant ce qu’on ressent dans son corps, on inclut aussi, par strates successives, les sons, les pensées, les émotions dans notre expérience de l'instant présent. Cette attention plus largement ouverte tend naturellement vers ce qu'on pourrait aussi appeler une « conscience attentive », et qui se rapproche fortement de la pleine conscience.
Mais il y a encore autre chose dans la pleine conscience. La seconde direction de travail possible porte en effet non plus sur l’ouverture mais sur la qualité de notre attention : « analytique » ou « immergée ». L’attention analytique, c’est celle que nous mobilisons lorsque nous nous concentrons sur la résolution d’un problème ardu, mathématique ou existentiel. Notre intelligence fonctionne alors à plein, nos pensées s’enchainent, notre raisonnement avance, et nous analysons dans le détail les tenants et les aboutissants du problème. L’attention immergée, elle, se situe à un autre niveau : elle nous fait oublier que nous sommes en train de réfléchir ou d'agir. L'attention immergée peut concerner des activités simples : être absorbé par un film passionnant, ou par le rythme de sa foulée lors d’un jogging. Mais elle concerne aussi des tâches plus complexes : descendre une pente à ski, jouer d'un instrument de musique, ou s'absorber dans une tâche intellectuelle. Dans toutes ces situations nous sommes pleinement attentifs à ce que nous faisons (sinon nous tomberions, ferions une fausse note ou serions sans arrêt distraits de notre réflexion). Mais nous le sommes dans un état d’attention dite « immergée » : nous sommes si intensément présents à ce que nous faisons que nous sommes complètement « dedans », sans besoin de mentaliser ou d’analyser ce qui se passe.
Plus notre attention est élargie et immergée, plus nous nous rapprochons de la pleine conscience : une présence intense et ouverte, pas seulement mentale mais globale (incluant notre corps tout entier), à l'expérience que nous vivons instant après instant.
(Christophe ANDRÉ, « Méditer, jour après jour », Éd. L’iconoclaste, 2011, p. 92-94)
Mimosa, Bretagne (France) |
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