Le temps est souvent comparable à une fine poudre d’or que nous laisserions couler distraitement entre nos doigts sans même nous en apercevoir. Utilisé à bon escient, il devient la navette que l’on fait courir entre les fils des jours pour tisser l’étoffe de la vie. Il est donc essentiel à la quête du bonheur de prendre conscience que le temps est notre bien le plus précieux. Sans causer de tort à personne, il faut avoir la force d’esprit de ne pas céder à la petite voix qui nous susurre d’accorder d’incessantes concessions aux exigences de la vie quotidienne. Pourquoi hésiter à faire table rase du superflu ? Quel avantage y a-t-il à se consacrer au superficiel et à l’inutile ? Ainsi que le dit Sénèque : « Ce n’est pas que nous disposions de très peu de temps, c’est plutôt que nous en perdons beaucoup. »
La vie est courte. Si l’on ne cesse de reporter l’essentiel à plus tard pour se laisser piéger par les contraintes incohérentes de la société, on sera toujours perdant. Les années ou les heures qui nous restent à vivre sont comme une précieuse substance qui s’effrite facilement et n’offre aucune résistance au gaspillage. Malgré son immense valeur, le temps ne sait se protéger lui-même tel un enfant que le premier venu emmène par la main.
Pour l’homme actif, le temps d’or est celui qui permet de créer, de construire, d’accomplir, de se consacrer au bien des autres et à l’épanouissement de sa propre existence. Quant au contemplatif, le temps lui permet de regarder lucidement en lui-même pour éclairer son monde intérieur et retrouver l’essence de l’existence. C’est le temps d’or qui, en dépit d’une inaction apparente, permet de jouir pleinement du moment présent. ...
Le désœuvré parle de « tuer le temps ». Quelle terrible expression ! Le temps n’est plus alors qu’une longue ligne droite monotone. C’est le temps de plomb : il pèse sur l’oisif comme un fardeau et accable celui qui ne supporte pas l’attente, le retard, l’ennui, la solitude, la contrariété et parfois même l’existence. Chaque instant qui passe aggrave son emprisonnement. Pour d’autres, le temps n’est plus que le compte à rebours vers une mort qu’ils redoutent, ou qu’ils appellent parfois de leurs vœux quand ils sont las de vivre. «Le temps qu’ils n’arrivaient pas à tuer finit par les tuer. »
Je me souviens d’une visite dans le sud de la France avec un groupe de moines du monastère où je vis au Népal. Quelques retraités jouaient aux boules sur une place. Je m’aperçus que l’un des moines avait les larmes aux yeux. Il se tourna vers moi et dit : « Ils jouent... comme des enfants ! » et ajouta : « Chez nous, à l’approche de la mort, les vieillards qui ne travaillent plus consacrent leur temps à la méditation et la prière. »
Ressentir le temps comme une expérience pénible et insipide, sentir qu’on n’a rien fait au terme de la journée, au terme d’une année puis au terme de la vie, signale à quel point nous demeurons inconscients du potentiel d’épanouissement dont nous sommes porteurs.
(Matthieu RICARD, « Plaidoyer pour le bonheur », Pocket n°12 276, 2005, p.266-267)La vie est courte. Si l’on ne cesse de reporter l’essentiel à plus tard pour se laisser piéger par les contraintes incohérentes de la société, on sera toujours perdant. Les années ou les heures qui nous restent à vivre sont comme une précieuse substance qui s’effrite facilement et n’offre aucune résistance au gaspillage. Malgré son immense valeur, le temps ne sait se protéger lui-même tel un enfant que le premier venu emmène par la main.
Pour l’homme actif, le temps d’or est celui qui permet de créer, de construire, d’accomplir, de se consacrer au bien des autres et à l’épanouissement de sa propre existence. Quant au contemplatif, le temps lui permet de regarder lucidement en lui-même pour éclairer son monde intérieur et retrouver l’essence de l’existence. C’est le temps d’or qui, en dépit d’une inaction apparente, permet de jouir pleinement du moment présent. ...
Le désœuvré parle de « tuer le temps ». Quelle terrible expression ! Le temps n’est plus alors qu’une longue ligne droite monotone. C’est le temps de plomb : il pèse sur l’oisif comme un fardeau et accable celui qui ne supporte pas l’attente, le retard, l’ennui, la solitude, la contrariété et parfois même l’existence. Chaque instant qui passe aggrave son emprisonnement. Pour d’autres, le temps n’est plus que le compte à rebours vers une mort qu’ils redoutent, ou qu’ils appellent parfois de leurs vœux quand ils sont las de vivre. «Le temps qu’ils n’arrivaient pas à tuer finit par les tuer. »
Je me souviens d’une visite dans le sud de la France avec un groupe de moines du monastère où je vis au Népal. Quelques retraités jouaient aux boules sur une place. Je m’aperçus que l’un des moines avait les larmes aux yeux. Il se tourna vers moi et dit : « Ils jouent... comme des enfants ! » et ajouta : « Chez nous, à l’approche de la mort, les vieillards qui ne travaillent plus consacrent leur temps à la méditation et la prière. »
Ressentir le temps comme une expérience pénible et insipide, sentir qu’on n’a rien fait au terme de la journée, au terme d’une année puis au terme de la vie, signale à quel point nous demeurons inconscients du potentiel d’épanouissement dont nous sommes porteurs.
Soleil couchant, à proximité du Pic Naouri (Burkina-Faso) |
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