Riche de millions d'années d'évolution, le circuit ascendant instinctif, prompt à l'action, favorise la pensée à court terme, les pulsions et les décisions rapides. Les circuits descendants qui occupent l'avant et le sommet du cerveau sont un ajout plus tardif, leur pleine maturation remonte à peine à quelques centaines de milliers d'années.
Le câblage descendant apporte au répertoire de notre esprit des talents tels que la conscience de soi et la réflexion, la délibération et la planification. La focalisation intentionnelle, descendante, offre à l'esprit un levier dans la gestion de notre cerveau. Quand notre attention passe d'une tâche, d'un projet, d'une sensation, à l'autre, les circuits cérébraux correspondants s'illuminent. Faites remonter le souvenir heureux d'une danse, et voilà les neurones de la joie et du mouvement qui s'animent. Rappelez-vous l'enterrement d'un être cher, et c'est le circuit de la tristesse qui s'active. Répétez mentalement un coup de golf, et les axones et les dendrites qui orchestrent ce mouvement renforcent encore un peu leurs liens.
Le cerveau humain compte parmi les inventions passables, mais pas parfaites, de l'évolution. Les systèmes cérébraux ascendants, plus anciens, semblent avoir bien opéré pour assurer notre survie pendant l'essentiel de la préhistoire – mais leur fonctionnement pose aujourd'hui certains problèmes. Dans le plus clair de notre existence actuelle, l'ancien système tient la barre, ce qui est généralement à notre avantage, mais parfois à notre détriment : les dépenses excessives, les addictions ou la conduite dangereuse sont autant de signes d'inadaptation de ce système.
Les exigences que posait la survie au début de l'évolution ont rempli notre cerveau de programmes ascendants préétablis pour la procréation et l'éducation des enfants, pour la distinction entre ce qui est plaisant et ce qui est dégoûtant, pour fuir une menace ou se précipiter sur la nourriture et ainsi de suite. Transposons-le au monde actuel, très différent : on voit bien que nous sommes contraints de naviguer dans la vie en mode descendant, contre le courant permanent des caprices et des pulsions venus d'en bas.
Un facteur étonnant fait constamment pencher la balance en faveur du système ascendant : le cerveau est économe en énergie. Les efforts cognitifs que réclament par exemple l'apprentissage de la dernière version d'un logiciel requièrent une attention active qui possède un coût énergétique. Mais plus on répète ce qui a été un jour une séquence nouvelle, plus elle devient routinière et bascule sous la responsabilité du circuit ascendant, notamment des réseaux de neurones des ganglions de la base, une masse de la taille d'une balle de golf nichée au fond du cerveau, juste au-dessus de la colonne vertébrale. Plus on répète une pratique, plus les ganglions de la base la confisquent à d'autres régions du cerveau.
Les systèmes ascendants se répartissent les tâches mentales de façon à nous demander le moins d'effort pour le meilleur résultat. À mesure que l'habitude rend plus facile une pratique répétitive, celle-ci passe du sommet à la base. Nous percevons ce transfert neuronal au fait qu'elle réclame moins d'attention – et finalement plus du tout – à mesure qu'elle s'automatise.
On atteint le sommet de l'automatisme quand l'expertise permet de consacrer une attention sans effort à une tâche d'un niveau d'exigence élevé, comme on l'observe dans les parties d'échecs des grands maîtres, les courses automobiles ou l'acte de peindre un tableau. Faute de pratique suffisante, tout cela réclamera une focalisation délibérée. Mais une fois qu'on a atteint un degré de maîtrise des aptitudes correspondant à la hauteur de la demande, elles ne nous réclameront pas d'effort cognitif supplémentaire – ce qui libérera notre attention pour apporter ce petit plus que seule atteint l'élite.
Les joueurs d'échecs de catégorie mondiale en témoignent : au plus haut niveau, quand tous les adversaires ont accumulé autant de milliers d'heures de pratique, la compétition devient un jeu mental ; l'état d'esprit détermine la qualité de la concentration du coup, celle de la performance d'ensemble. Plus on est capable de se détendre et de se fier aux suggestions venues d'en bas, plus on libère son esprit pour qu'il fasse preuve de vivacité.
(GOLEMAN Daniel, « Focus, Attention et concentration : les clefs de la réussite » (2013), Éditions Robert Laffont, p.36-37)
Le câblage descendant apporte au répertoire de notre esprit des talents tels que la conscience de soi et la réflexion, la délibération et la planification. La focalisation intentionnelle, descendante, offre à l'esprit un levier dans la gestion de notre cerveau. Quand notre attention passe d'une tâche, d'un projet, d'une sensation, à l'autre, les circuits cérébraux correspondants s'illuminent. Faites remonter le souvenir heureux d'une danse, et voilà les neurones de la joie et du mouvement qui s'animent. Rappelez-vous l'enterrement d'un être cher, et c'est le circuit de la tristesse qui s'active. Répétez mentalement un coup de golf, et les axones et les dendrites qui orchestrent ce mouvement renforcent encore un peu leurs liens.
Le cerveau humain compte parmi les inventions passables, mais pas parfaites, de l'évolution. Les systèmes cérébraux ascendants, plus anciens, semblent avoir bien opéré pour assurer notre survie pendant l'essentiel de la préhistoire – mais leur fonctionnement pose aujourd'hui certains problèmes. Dans le plus clair de notre existence actuelle, l'ancien système tient la barre, ce qui est généralement à notre avantage, mais parfois à notre détriment : les dépenses excessives, les addictions ou la conduite dangereuse sont autant de signes d'inadaptation de ce système.
Les exigences que posait la survie au début de l'évolution ont rempli notre cerveau de programmes ascendants préétablis pour la procréation et l'éducation des enfants, pour la distinction entre ce qui est plaisant et ce qui est dégoûtant, pour fuir une menace ou se précipiter sur la nourriture et ainsi de suite. Transposons-le au monde actuel, très différent : on voit bien que nous sommes contraints de naviguer dans la vie en mode descendant, contre le courant permanent des caprices et des pulsions venus d'en bas.
Un facteur étonnant fait constamment pencher la balance en faveur du système ascendant : le cerveau est économe en énergie. Les efforts cognitifs que réclament par exemple l'apprentissage de la dernière version d'un logiciel requièrent une attention active qui possède un coût énergétique. Mais plus on répète ce qui a été un jour une séquence nouvelle, plus elle devient routinière et bascule sous la responsabilité du circuit ascendant, notamment des réseaux de neurones des ganglions de la base, une masse de la taille d'une balle de golf nichée au fond du cerveau, juste au-dessus de la colonne vertébrale. Plus on répète une pratique, plus les ganglions de la base la confisquent à d'autres régions du cerveau.
Les systèmes ascendants se répartissent les tâches mentales de façon à nous demander le moins d'effort pour le meilleur résultat. À mesure que l'habitude rend plus facile une pratique répétitive, celle-ci passe du sommet à la base. Nous percevons ce transfert neuronal au fait qu'elle réclame moins d'attention – et finalement plus du tout – à mesure qu'elle s'automatise.
On atteint le sommet de l'automatisme quand l'expertise permet de consacrer une attention sans effort à une tâche d'un niveau d'exigence élevé, comme on l'observe dans les parties d'échecs des grands maîtres, les courses automobiles ou l'acte de peindre un tableau. Faute de pratique suffisante, tout cela réclamera une focalisation délibérée. Mais une fois qu'on a atteint un degré de maîtrise des aptitudes correspondant à la hauteur de la demande, elles ne nous réclameront pas d'effort cognitif supplémentaire – ce qui libérera notre attention pour apporter ce petit plus que seule atteint l'élite.
Les joueurs d'échecs de catégorie mondiale en témoignent : au plus haut niveau, quand tous les adversaires ont accumulé autant de milliers d'heures de pratique, la compétition devient un jeu mental ; l'état d'esprit détermine la qualité de la concentration du coup, celle de la performance d'ensemble. Plus on est capable de se détendre et de se fier aux suggestions venues d'en bas, plus on libère son esprit pour qu'il fasse preuve de vivacité.
(GOLEMAN Daniel, « Focus, Attention et concentration : les clefs de la réussite » (2013), Éditions Robert Laffont, p.36-37)
Souches d'arbres, Parc de Biogradska Gora (Monténégro) |
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