dimanche 29 septembre 2013

Nous accumulons les choses parce que nos cœurs sont vides.

 Le trésor, dans la caverne qui disparaît
Un villageois passait un jour devant une caverne creusée dans une montagne, et c’était le moment précis où cette caverne faisait une de ses rares apparitions permettant à tous ceux qui le désiraient s’enrichir de ses trésors. L’homme entra donc dans la caverne et découvrit des amoncellements de bijoux et de pierres précieuses qu’il fourra en toute hâte dans les sacoches de selle de son âne, parce qu’il connaissait la légende selon laquelle la caverne ne serait accessible que pour une très brève période de temps, de sorte qu’il fallait se hâter de saisir ses trésors.
L’âne était chargé au maximum et l’homme se remettait en route, quand il se souvint tout à coup qu’il avait laissé son bâton dans la caverne. Mais le moment était arrivé pour la caverne de disparaître : elle disparut, l’homme disparut avec elle et on ne le revit jamais plus.
Après l’avoir attendu un an ou deux, les villageois vendirent le trésor qu’ils avaient trouvé sur le dos de l’âne et devinrent les bénéficiaires de la bonne chance de l’infortuné bonhomme.
Quand le moineau construit son nid dans la forêt, il n’occupe qu’une branche. Quand le cerf étanche sa soif à la rivière, il ne boit pas plus que son estomac ne peut contenir.
Nous accumulons les choses parce que nos cœurs sont vides.

(Anthony de Mello, s.j., « Histoires d’humour et de sagesse » [1987], Éd. Albin Michel poche 2011 n°172, p.87-89)

Grenier collectif, Ksar Ouled Soltane (Tunisie)

vendredi 27 septembre 2013

Apaiser ses doutes

Ne prenons pas les doutes trop au sérieux. Ne les laissons pas prendre des proportions démesurées, ne devenons pas manichéens ou fanatiques à leur égard. Ce lien passionnel que notre culture nous a conditionnés à entretenir avec le doute, apprenons plutôt à le transformer peu à peu en une relation libre, pleine d’humour et de compassion. Cela signifie qu’il nous faut accorder du temps aux doutes et à nous-mêmes, afin de trouver à nos questions des réponses qui ne soient pas simplement intellectuelles ou « philosophiques » mais vivantes, réelles, authentiques et pratiques.
Les doutes ne peuvent pas être résolus instantanément mais, si nous sommes patients, un espace apparaîtra en nous au sein duquel ils pourront être soigneusement et objectivement examinés, clarifiés, dissipés et apaisés. Ce qui nous manque, dans notre culture en particulier, c’est un environnement approprié, libre de distraction, riche et spacieux pour notre esprit. Il ne peut être créé que par une pratique assidue de la méditation, et c’est dans cette atmosphère que nos aperçus de la sagesse auront la possibilité de croître et d’arriver peu à peu à maturité.
(SOGYAL Rinpoché, « Étincelles d’éveil » (1995), Pocket n°14 913, 2013, pensée du 16 novembre)

Pic du Naouri (Burkina-Faso)

mardi 24 septembre 2013

Créer de nouvelles habitudes de l’esprit

Il me regarda en silence pendant quelques instants, puis prit un verre d’eau, un verre à pied en cristal d’une finesse presque irréelle. Il le porta au-dessus de la pyramide de safran [disposée au centre de la table dans des assiettes en argent] et commença à l’incliner lentement. Je ne quittai pas des yeux le cristal ciselé dans lequel l’eau apparaissait lumineuse.
- Nous naissons tous avec le même potentiel en matière de confiance en soi, dit-il. Puis nous recevons les commentaires de nos parents, nos nounous, nos instituteurs…
Une goutte d’eau se détacha et tomba sur le sommet de la pyramide, formant comme une loupe grossissant à l’excès chaque particule orange de la précieuse épice. La goutte sembla hésiter puis se fraya lentement un chemin, dévalant la pente. En accélérant jusqu’à la base.
- Si par malchance, reprit-il, ils tendent tous dans un sens négatif, formulant des critiques, des reproches, attirant notre attention sur nos manquements, nos erreurs et nos échecs, alors le sentiment d’insuffisance et d’autocritique s’inscrivent dans nos habitudes de pensée.
Il inclina de nouveau le verre, lentement, et une deuxième goutte tomba au même endroit. Elle hésita à son tour puis emprunta le même chemin que la première. La troisième goutte fit de même, plus vite que la précédente. Au bout de quelques secondes, un sillon s’était dessiné et les gouttes s’y précipitaient, le creusant un peu plus à chaque passage.
- À la longue, la plus petite des maladresses nous met mal à l’aise, le plus secondaire des échecs nous amène à douter de nous, et la plus insignifiante des critiques nous déstabilise et nous fait perdre nos moyens. Le cerveau s’habitue à réagir négativement, les liens neuronaux se renforçant à chaque expérience. …
- Il y a moyen de sortir de ce cercle infernal ? demandai-je.
- Ce n’est pas définitif, en effet. Mais c’est difficile d’en sortir. Cela demande des efforts…
Il pencha la tête de côté et, déposant une nouvelle goutte d’eau sur le sommet de la pyramide, il souffla dessus suffisamment pour l’obliger à prendre une autre direction. Elle se fraya lentement un nouveau chemin jusqu’à la base.
- Et surtout, reprit-il, ces efforts doivent être impérativement soutenus dans le temps. Car notre esprit est très attaché à nos habitudes de pensée, même lorsqu’elles font souffrir.
Il renversa une nouvelle goutte sur la pointe du monticule et elle se précipita dans l’ancien sillon.
- Ce qu’il faut, dit-il, c’est…
Il maintint un souffle continu, comme il l’avait fait précédemment, et les gouttes suivantes furent contraintes d’emprunter le nouveau chemin, creusant progressivement un nouveau sillon. Au bout d’un moment il cessa de souffler, et les gouttes continuèrent de suivre cette nouvelle voie.
- … c’est créer de nouvelles habitudes de l’esprit. Reproduire suffisamment souvent des pensées valorisantes associées à des émotions positives, jusqu’à ce que de nouveaux liens neuronaux. Se créent, se renforcent, puis deviennent prépondérants. Cela prend du temps.
Je ne quittais pas des yeux la belle pyramide orange, maintenant creusée de deux sillons bien marqués.
...
(GOUNELLE Laurent, « Dieu voyage toujours incognito », éd. Anne Carrière, 2010, p.185-187)

Exposition Folon, parc de La Hulpe [2008] (Belgique)

samedi 21 septembre 2013

Le bombardement de notre système nerveux par des images, des sons et des informations renforce l'agitation constante de nos pensées

Le bombardement de notre système nerveux par des images, des sons et des informations est particulièrement stressant s’il reste constant. Si vous allumez la télévision quand vous vous éveillez, allumez la radio en voiture pour aller au travail, regardez les nouvelles quand vous revenez à la maison, puis regardez la télé ou un film le soir, vous remplissez votre esprit d’images qui n’ont pas de relation directe avec votre vie. Que le spectacle soit merveilleux ou l’information intéressante, ils resteront probablement bidimensionnels pour vous et ne dureront pas. Mais en étant sans cesse soumis à ce régime, qui nourrit la faim mentale d’information et de diversion, vous éliminez de votre vie des alternatives très importantes : du temps pour le silence, pour la paix, pour être simplement avec ce qui se passe ; du temps pour penser, pour jouer, pour faire des choses réelles. L’agitation constante de nos esprits pensants, que nous rencontrons de façon si vive dans la pratique de la méditation, est en réalité nourrie et renforcée par notre régime de télévision, de radio, de journaux et de films. Nous enfournons constamment dans notre esprit davantage de choses auxquelles réagir, auxquelles penser, pour lesquelles nous tourmenter, être obsédés, et auxquelles nous souvenir, comme si notre vie quotidienne n’en produisait pas assez. Le plus drôle, c’est que nous faisons cela pour nous reposer de nos soucis et de nos préoccupations, pour détourner notre esprit de nos difficultés, pour nous distraire, pour nous évader, pour nous aider à nous détendre.
(Dr Jon Kabat-Zinn John, « Au cœur de la tourmente, la pleine conscience » (1989), J’ai Lu n°9 932, 2012, Préfaces de Thich Nhat Hanh (1989) et Christophe André (2009), p.699-700)
Jon Kabat-Zinn est l’inventeur d’une méditation accessible à tous : la « méditation en pleine conscience ». À ce jour [en 2012], plus de 550 centres, hôpitaux ou cliniques utilisent la MBSR aux États-Unis, et plus de 700 à travers le monde, l’utilisent comme outil de soin.

Limpidité des eaux de la rivière Soča (Slovénie)

mercredi 18 septembre 2013

Votre vie est entre vos mains

Selon un principe éthique général, plus on a de pouvoir sur quelqu’un, plus on a le devoir d’en user avec bienveillance. Eh bien, sur qui avez-vous le plus de pouvoir au monde ? Sur votre moi à venir. Cette vie est entre vos mains, et ce qu’elle sera dépend du soin que vous lui apportez. …
[Il est important] de comprendre ce qui est ou non en notre pouvoir. Il est impossible de changer le passé … En revanche, on peut préparer les conditions d’un avenir meilleur, le plus souvent de manière simple et humble. Par exemple, au cours d’une réunion de travail tendue, en inspirant puis en expirant longuement afin d’activer les vertus apaisantes du système nerveux parasympathique (SNP). De même, lorsqu’une expérience contrariante nous revient à l’esprit, on peut se rappeler le sentiment éprouvé en compagnie d’un être qui nous aime – et imprégner ainsi peu à peu le souvenir d’une tonalité positive. Ou encore, pour stabiliser l’esprit, il est possible de prolonger délibérément les sensations de bonheur et d’augmenter par la même occasion les niveaux de dopamine, un neurotransmetteur favorable à la focalisation de l’attention.
Avec le temps, ces petits gestes finissent par compter. Chaque jour, les activités ordinaires – comme l’ensemble des pratiques spirituelles ou de développement semble des pratiques spirituelles ou de développement personnel – nous offrent des dizaines d’occasions de changer radicalement notre cerveau. Nous avons réellement ce pouvoir – une chance merveilleuse dans un monde où tant de forces nous dépassent. Une seule goutte d’eau n’a qu’un effet limité, mais le temps et le nombre de gouttes suffisants permettent de creuser un Grand Canyon.
Toutefois, pour y parvenir, il faut être dans son propre camp. Peut-être n’est-ce pas très facile au début : la plupart des gens accordent plus de bienveillance à leur prochain qu’à eux-mêmes. Pour passer dans son camp, il peut être utile de trouver des arguments convaincants. Par exemple, songez aux faits suivants :
•    Quand vous étiez petit, vous méritiez autant de soins et d’affection que n’importe quel autre enfant. Pouvez-vous vous revoir enfant ? Ne souhaiteriez-vous pas le meilleur à ce petit être ? Il en va de même aujourd’hui : vous êtes un être humain comme les autres, et vous méritez autant le bonheur, l’amour et la sagesse.
•    Progresser sur la voie de l’éveil vous rendra plus efficace dans votre travail et dans vos relations. Pensez aux nombreux avantages dont bénéficiera votre entourage si vous êtes de meilleure humeur, plus chaleureux et plus perspicace. Veiller à son propre développement n’est pas égoïste. C’est en réalité un grand cadeau que l’on fait aux autres.
(HANSON Rick et MENDIUS Richard, « Le cerveau de Bouddha : Bonheur, amour et sagesse au temps des neurosciences » (2009), Pocket n°15 216, 2013, Préface de Christophe André, p. 44-46)

Arbres et dunes, Sosuvlei, Désert du Namib (Namibie)

dimanche 15 septembre 2013

Préoccupations

Voyez comme certains mots ont été formés de manière que l’on comprenne clairement leur signification.
Prenons le mot « préoccupation », et scindons-le en deux : « pré » et « occupation ». Il signifie s’occuper d’une chose avant qu’elle ne se produise.
Qui donc, dans tout cet univers, possède l’aptitude de s’occuper de quelque chose qui n’est pas encore arrivé ?
Ne soyez jamais préoccupés. Soyez attentifs à votre destin et à votre chemin. …
(Paulo COELHO, « Maktub », 1994, Éditions Anne Carrière, 2004, p.81  ; J'ai Lu n°9651, 2011, p.76)


Réserve de Nazinga (Burkina-Faso)

jeudi 12 septembre 2013

La plupart du temps, nous ne sommes pas conscients de nos états mentaux.

L’esprit connaît généralement deux états : la quiétude et le mouvement. Il est parfois calme et libre des pensées comme une étendue d’eau immobile : c’est l’esprit dans sa phase de quiétude. Cet état ne dure habituellement pas. Des pensées surgissent : c’est ce que l’on appelle « mouvement ». En réalité, bien qu’à première vue le mouvement des pensées se distingue clairement de la quiétude, il n’existe entre ces deux états aucune différence de nature. L’un comme l’autre se caractérisent par l’absence de réalité en soi. Quiétude et mouvement ne sont que deux aspects l’esprit.
La plupart du temps, nous ne sommes pas conscients de nos états mentaux. Nous ne remarquons même pas si notre esprit est calme ou agité. Supposez qu’au cours d’une séance de méditation vous ayez soudain l’idée d’aller au marché. Si vous êtes conscients de cette pensée et la laissez se dissoudre d’elle-même, cela n’ira pas plus loin. Si, par contre, vous ne la remarquez pas et la laissez se développer, elle donnera naissance à une deuxième pensée – celle, par exemple, d’interrompre votre pratique – puis à une troisième – celle de vous lever et de prendre la direction du marché, et bientôt d’autres idées envahiront votre esprit : où acheter ceci, comment vendre cela, etc. Vous serez alors bien loin de votre méditation !
Il est tout à fait naturel que les pensées surviennent les unes après les autres. Notre but n’est pas de les arrêter, ce qui serait d’ailleurs impossible, mais de les libérer. On y parvient en demeurant dans la simplicité, la fraîcheur du moment, en laissant les pensées aller et venir sans les entretenir ni s’y attacher. Lorsqu’on n’alimente plus le mouvement des pensées, celles-ci s’évanouissent d’elles-mêmes sans laisser de traces. Quand on n’altère plus l’état de quiétude par des constructions mentales, on peut maintenir sans effort la sérénité naturelle de l’esprit.
(Dilgo Khyentsé Rinpotché, cité par Matthieu RICARD, « Chemins spirituels, petite anthologie des plus beaux textes tibétains » (2010), Pocket n°14 777, 2011, p.194-195)

Dunes à proximité de lArakao (Niger)

lundi 9 septembre 2013

L’instant présent

L’autre jour tu attendais le train sur un quai de gare. Tu l’attendais vraiment : regardant l’heure régulièrement, observant l’horizon et te demandant s’il allait arriver par la droite ou la gauche. Tout en sachant que l’heure prévue du départ n’était que dans dix minutes. Tu te demandais si c’était un train qui venait d’ailleurs (dans ce cas, il arriverait seulement à l’heure prévue) ou s’il partait d’ici (dans ce cas, il serait à quai plus longtemps avant, et tu pourrais y monter).
Bref, tu avais l‘esprit complètement encombré de trucs inintéressants. Heureusement, tu t’en es rendu compte (ce n’est pas toujours le cas…). Tout à coup, tu t’es vu en train d’attendre ton train comme un chien attend sa pâtée, Tu n’as rien contre les chiens, ils sont sympas, mais bon, chacun sa vie.
Alors, tu t’es dit que non, c’était vraiment « trop pas intéressant » comme disent les enfants. Et tu as modifié ton état d’esprit : au lieu de « faire » quelque chose (attendre), tu es passé sur le registre « être juste là » et savourer l’instant présent. Tu as laissé tomber la montre et l’horizon du bout des rails. Et tu as tourné ton attention vers ta respiration, la façon dont tu te tenais, tu t’es doucement redressé, tu as ouvert tes épaules ; puis, tu as aussi ouvert tes oreilles, tu as écouté les sons, les rumeurs, les bruits de rails, les cris d’oiseaux ; tu as reniflé, comme un animal sorti des bois, cette étrange odeur de métal et de béton qui flotte dans les gares ; tu as observé la lumière de ce matin de printemps, les mouvements lents d’un train de marchandises tout au bout des quais, les nuages, toutes les installations, les panneaux, les bâtiments au loin. Fantastique, tout ce qu’il y avait à voir et à ressentir.
Fantastique, comme c’était intéressant et apaisant d’être  intensément là, présent à ta vie de l’instant. Lorsque tu es monté dans le train, tu étais serein comme jamais. Tu ne l’avais pas attendu une seconde. Tu avais juste vécu ta vie. Trop pur !

(Christophe ANDRÉ, « Sérénité, 25 histoires d’équilibre intérieur », Éd. Odile Jacob, 2012, p.85-86)

Détail d'une épave, Port de Camaret (Bretagne, France)

vendredi 6 septembre 2013

La méditation d’« échange de soi contre autrui »

[Cette méditation] consiste simplement à s’imaginer à la place de quelqu’un que l’on n’aime pas vraiment.
Cet échange peut s’effectuer n’importe quand et n’importe où, mais il est utile d’en comprendre les éléments essentiels en le pratiquant de façon formelle. La pratique formelle est comparable à la recharge d’une batterie de téléphone portable. Une fois que la batterie est pleine, vous pouvez utiliser le téléphone pendant un temps relativement long, où vous voulez et quand vous voulez. Elle finit cependant par se vider, et il faut alors la recharger. La différence principale entre la charge d’une batterie et le développement de l’amour bienveillant et de la compassion par la pratique formelle est qu’au bout du compte l’habitude de répondre aux autres avec compassion crée un ensemble de connexions neuronales qui se perpétue sans cesse et, en quelque sorte, ne perd plus sa « charge ».
La première chose à faire, comme d’habitude pour les pratiques formelles, est d’adopter la posture appropriée et de laisser votre esprit se reposer un instant. Ensuite, évoquez le souvenir de quelqu’un que vous n’aimez pas. Abstenez-vous de juger vos sentiments. Donnez-vous l’entière permission de ressentir ce que vous voulez. Le fait de renoncer à tout jugement ou justification vous donnera un certain degré d’ouverture et de clarté.
L’étape suivante consiste à admettre que ce que vous ressentez – colère, ressentiment, jalousie, désir – est en soi la source de votre souffrance ou de votre malaise. Le responsable de votre souffrance n’est pas l’objet de votre ressentiment, mais la manière dont vous réagissez mentalement à son endroit.
Par exemple, portez votre attention sur quelqu’un qui vous a tenu des propos apparemment critiques, cruels ou méprisants, ou qui vous a menti. Reconnaissez alors que la seule chose qui s’est produite, c’est que cette personne a émis des sons et que vous les avez entendus. Si vous avez passé un tant soit peu de temps à exercer la méditation du calme mental en prenant le son comme support, cet aspect de l’échange de soi contre autrui vous paraîtra familier.
À ce stade, trois possibilités s’offrent à vous. La première, et la plus probable, est que vous vous laisserez consumer par la colère, la culpabilité ou le ressentiment. La deuxième (très improbable) est que vous penserez : « J’aurai dû passer plus de temps à méditer sur le son. » La troisième est que vous prendrez mentalement la place de celui qui a dit ou fait ce que vous ressentez comme douloureux. Demandez-vous s’il était réellement motivé par le désir de vous faire du mal ou s’il essayait de se libérer de sa propre douleur.
Souvent, vous connaîtrez déjà la réponse. Vous avez peut-être surpris une conversation au sujet des problèmes de santé ou de couple de cette personne, ou sur les menaces pesant sur sa situation professionnelle. Mais même si vous ne connaissez rien d’elle, vous saurez, grâce à votre pratique, lorsque vous cultiverez la compassion pour vous-même et l’étendrez ensuite aux autres, que le comportement d’un être n’a qu’un motif possible : le désir de se sentir heureux et en sécurité. Si quelqu’un fait ou dit quelque chose de malveillant, c’est parce qu’il ne se sent pas heureux ou en sécurité, parce qu’il a peur. Et vous savez ce que c’est, d’avoir peur. Cette reconnaissance de la situation de l’autre est le point essentiel de l’échange de soi contre autrui.
(Yongey Mingyour Rinpotché, « Bonheur de la méditation », préfacé par Matthieu Ricard, Le livre de poche n°31 349, 2009, p.299-301)

Massif de l'Aragats (Arménie)

mardi 3 septembre 2013

Tout peut devenir une invitation à la méditation

Tout peut devenir une invitation à la méditation : un sourire, un visage aperçu dans le métro, la vue d’une petite fleur poussant dans l’interstice d’un trottoir, une cascade d’étoffe chatoyante dans une vitrine, un rayon de soleil illuminant des fleurs sur le rebord d’une fenêtre. Soyez à l’affût de chaque manifestation de beauté et de grâce. Offrez chaque joie, soyez à tout moment attentif au « message émanant sans cesse du silence ».
Lentement, vous deviendrez maître de votre propre félicité, alchimiste de votre propre joie, ayant toutes sortes de remèdes à portée de main pour élever, égayer, éclairer et inspirer chacune de vos respirations et chacun de vos mouvements.
(SOGYAL Rinpoché, « Étincelles d’éveil » (1995), Pocket n°14 913, 2013, pensée du 22 septembre)

Orchidées, Hôtel de ville de Ljubljana (Slovénie)